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Château d'Ayres : le charme discret d'un bout du monde

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Au cœur des Cévennes, loin de tout grand axe routier, dans le secret d'un site époustouflant et chargé d'une histoire mythique, le château d'Ayres de Meyrueis est un lieu de villégiature où s'abandonner avec calme et volupté. On y goûte le charme d'une hôtellerie luxueuse, et les délices d'une table de haute facture. S'en priver serait péché ! L'occasion, aussi, de découvrir notre nouvelle application gratuite "Les balades de Marianne" pour iPhone, iPad et Androïd.

> > > Article paru dans Marianne daté du 21 août 2015

D'où que l'on vienne, le château d'Ayres est autant au milieu de tout qu'à mille lieues de tout. Sans doute est-ce la raison pour laquelle l'on y parvient avec une ferveur semblable à celle du pèlerin atteignant un monastère perdu dans quelque vallée sauvage des Carpates ou du Caucase, au terme d'un parcours exaltant et chaotique, parsemé de reliefs escarpés, de vallées sinueuses et de grands plateaux arides. Autrement dit, heureux d'être enfin arrivé tout en étant ravi d'être passé par là. Nous sommes à Meyrueis, aux confins du causse Noir, du causse Méjean et du causse du Larzac, c'est-à-dire nulle part en termes de grands axes routiers, là où la boussole devient philosophale. Et c'est bien là le génie de l'endroit. Placé au cœur d'un dispositif géographique époustouflant, cerné de hauts lieux géologiques, Meyrueis se mérite et s'exige, car il n'est pas anodin de pouvoir revendiquer une double appartenance à des territoires aux noms aussi évocateurs, et glorieux, que Cévennes et Gévaudan. Excusez du peu.

Du premier, on retient l'idée d'un socle résistant lié à la configuration de montagnes formant un gigantesque repaire protégé. Un refuge où le protestantisme prit racine mais qui fut aussi celui de quelques maquis durant l'occupation allemande. Du second, on retient la pérennité des émois d'une légende redoutable rehaussée par le courage de pauvres paysans luttant contre un terrible fauve avec l'énergie du désespoir. Pour finalement en triompher. Ils sont comme ça, les gens d'ici, ils font face, comme si leur tempérament avait été forgé dans la roche.

Résister, tenir et perpétuer, telle est la devise de ceux qui vivent et travaillent sur cette terre de défis. Y tenir un hôtel, fût-il de luxe et de charme, participe aussi de ce défi, car il ne suffit pas de maintenir les lieux en liesse, encore faut-il y faire venir, et revenir, le voyageur.

Des mythes et de la magie

Maîtres du château d'Ayres, Hélène et Jean-François de Montjou n'en demandaient pas plus pour accrocher à l'enseigne de leur vénérable demeure cette part de magie qui fait d'une ancienne abbaye un univers où les mythes font partie du décor. D'autant que l'esprit qui règne en ces vieux murs souffle encore à l'unisson de la symphonie cévenole.

Entre les camisards et la bête, Cévennes et Gévaudan furent le théâtre de tragédies gravées à jamais, en lettres majuscules, dans la mémoire locale. Huguenots révoltés contre l'interdiction de leur culte et les sévices subis en conséquence, à la suite de la révocation de l'édit de Nantes par Louis XIV, en 1685, les camisards tinrent tête, de 1702 à 1710, non sans exactions de leur part sur des populations civiles, aux armées du roi. De combats héroïques en irrédentismes pugnaces, des chefs comme Mazel et Cavalier incarnèrent la fierté d'une population refusant, jusqu'au sacrifice suprême, de se soumettre à l'arbitraire du pouvoir royal. Mises à feu et à sang, les Cévennes ont conservé dans leur chair le souvenir de ce tragique épisode de l'histoire de France. La bête du Gévaudan, dont on suppose qu'il s'agissait d'un grand loup particulièrement féroce, même si le mystère ne fut jamais totalement éclairci, sema la terreur dans cette partie du Massif central sous le règne de Louis XV. Bien que ne relevant ni de la guerre ni de la révolte, l'affaire monta jusqu'à Versailles, qui décida d'envoyer la troupe, associant ainsi la contrée à l'imaginaire d'un récit fantastique.

À l'assaut du causse

Des dragons et des loups, rien de tel pour cultiver les prouesses d'une mythologie locale. N'empêche, aujourd'hui encore, si l'on ne se cache plus à la vue d'un uniforme, les dragonnades se limitant désormais au dressage de procès-verbaux, pas un touriste avisé ne se promène entre chien et loup à l'orée d'une forêt lozérienne sans accélérer subitement le pas au craquement suspect d'une brindille. Il va de soi que des paysages aussi spectaculaires dans leurs profils, aussi majestueux dans leurs volumes et aussi infinis dans leurs perspectives n'allaient pas se contenter de faits divers de faubourgs aplanis.

Pour bien saisir la dimension du phénomène, il convient de rejoindre Meyrueis et le château d'Ayres en passant par les gorges du Tarn. Nous ne sommes plus là dans l'anecdote minérale mais face à l'un des plus impressionnants monuments naturels du continent. Un circuit tout simplement fabuleux, qui laisse le visiteur aussi pantois que s'il était face aux Dolomites et à l'Alhambra de Grenade réunis, en ce sens que le spectacle est fort et beau à la fois. Aux deux issues du défilé, par Saint-Enimie, au nord, ou par Le Rozier-Peyreleau, au sud, une route conduit jusqu'à Meyrueis, mais l'audace commande d'abandonner les gorges à La Malène pour grimper à l'assaut du causse Méjean par la vertigineuse D43 en direction de Hures-la-Parade à travers le plateau. Sensations garanties. L'expression « c'est beau, mais c'est loin » prend alors une signification d'une profondeur abyssale...

Posé aux prémices des gorges de la Jonte, jolie rivière prenant sa source au mont Aigoual, point culminant des Cévennes, le château d'Ayres baigne dans la fraîcheur verdoyante d'un parc aux essences variées. Ancienne abbaye bénédictine aménagée en hôtellerie, il ne reste que quelques fondations de la bâtisse du VIIe siècle puisque, après sa destruction par les raids sarrasins, le prieuré fut reconstruit au siècle suivant. Les conflits opposant les roitelets carolingiens en mal de possession ayant à nouveau ruiné les lieux, il faudra attendre 1025 pour que le moine Martin réédifie un troisième monastère obéissant à l'ordre de saint Benoît. Halte appréciée des pèlerins descendant des causses par la costo roumivo en direction de Saint-Guilhem-le-Désert, haut lieu du christianisme languedocien, le site prend le nom de Saint-Martin-des-Ayres et devient la possession de la puissante abbaye Saint-Victor de Marseille en 1058, qui le dote d'un domaine agricole étendu riche en céréales. L'activité pastorale ayant développé le commerce de la laine, Meyrueis connaît un essor économique retentissant et devient une place marchande réputée pour ses fileuses et ses tisserands. Après les soubresauts de la croisade contre les cathares et ceux de la guerre de Cent Ans, le monastère d'Ayres passe à la fin du Moyen Age sous la dépendance du chapitre de Montpellier. L'apparition de la Réforme au XVIe siècle constitue un bouleversement majeur, Meyrueis devenant un fief calviniste à part entière avec disparition du culte catholique. Pour punir les Galtier de Montauran, nouveaux maîtres des lieux, de leur soutien aux troupes protestantes du duc de Rohan, Richelieu ordonne en 1632 au sénéchal d'Anduze de raser les deux tours d'angle et le mur d'enceinte du prieuré, entre-temps transformé en fortin militaire après que les moines ont dû abandonner les lieux. Durant la révolte des camisards, pris d'assaut et incendié, Ayres sert de repaire aux insurgés avant d'échoir, après rétablissement sanglant de l'ordre ancien par le maréchal de Villars, dans l'escarcelle de la famille Manoël de Nogaret, dont l'un des rejetons, Etienne-Aymard, fait reconstruire le château sous sa forme actuelle au début du XVIIIe siècle. D'héritage en succession, le domaine se traîne en l'état jusqu'au début du XXe siècle où il est vendu à des particuliers apparentés à la dynastie des Nogaret. Il sera par la suite aménagé progressivement en hostellerie de campagne jusqu'à son adhésion au réseau Château Hôtels Collection.

Oasis de volupté en terre austère

Propriétaire du château d'Ayres, Jean-François de Montjou reçoit ses hôtes comme un seigneur, c'est-à-dire avec une modestie non feinte et quelque part touchante. Ils sont si nombreux, les hobereaux de palaces à échauguettes à vous faire l'honneur de vous accepter chez eux... Affable et avenant, l'homme aime à s'effacer devant le monument dont il sait n'être que le dépositaire à titre temporaire, comme le furent ses prédécesseurs. Ici ce sont les Cévennes qui commandent, et le causse qui donne le la. C'est l'endroit qui dit, pas le percepteur, ni le receveur, ni le contrôleur, ni le prescripteur. En franchissant le seuil de la maison, le visiteur se doute qu'il entre un peu dans l'histoire, que la pierre le toise avec respect, que le sol ne se dérobe pas sous le poids du destin et que du haut de l'imposante toiture ce sont treize siècles qui contemplent les gens de passage. Depuis le magistral escalier à la rampe forgée de souvenirs précieux, on s'imprègne de la majesté de l'ensemble. Rien n'est surfait ici, ni accentué, tout est dans son pur jus comme si la partie commerciale de l'activité était une formalité. Les chambres sont livrées dans leur version authentique, avec ce qu'il faut de confort pour séjourner dans le bonheur, mais sans ostentation, dans un style suranné cultivé avec soin et dont on espère qu'il est éternel. Surtout, ne changez rien, au risque de ressembler à ces hôtels sans âme et sans passé. La Lozère est connue pour son climat continental, glacial en hiver, torride en été. On se baignera quand même toute l'année, dans la piscine de plein air, à la saison chaude, et dans le magnifique bassin dernier cri creusé dans le sous-sol, à la froide. Et puis ce parc qui berce les sens et dans lequel on se pose comme on se repose en écoutant le silence millénaire, à moins que l'on ne préfère les activités découvertes, excursions et randonnées que propose le Parc national des Cévennes. Le genre de villégiature tranquille à laquelle on consacrerait bien volontiers une tranche de vie.

Mais l'autre versant de la maison, celui que l'on attaque par la face gueule, et qui culmine au sommet du talent de l'incroyable cuisinière qu'est devenue Hélène de Montjou, se dresse sur la terrasse ombragée du château. Dîner de crépuscule ou déjeuner solaire par lesquels la force des éléments locaux active l'émotion sensorielle du gourmand. Un jour la patronne se fit chef car il manquait un cuisinier en cuisine. A la fois camisarde du fourneau et bergère affrontant la bête de l'adversité subite, Hélène de Montjou relève son défi avec maestria. La dame d'Ayres a la simple intelligence de concocter des plats que l'appétit appelle à goûter ici. Ce furent ce soir-là des cannellonis de courgette à la brousse des causses aux herbes et pesto, fluides et frais mais pleins de verve. Ce fut le pélardon de la ferme des Oubrets rôti et sa tartine au thym avec des oignons confits et des chips de jambon de la montagne, décoiffant d'intensité. Ce fut le filet de sole poêlé et sa brochette de pommes de terre grenaille en aïoli, qui place cette table à un niveau étoilable. Ce fut le magret de canard du Rouergue voisin, grillé à la plancha sauce à l'orange et ses carottes oubliées confites au miel. Un festin de circonstance comme on rêve depuis l'instant où, quittant le lit du Tarn, on s'approche de cette oasis de volupté en terre austère. Cave régionale et plateau de fromages locaux sont à la hauteur du défi que relèvent triomphalement les Montjou et leur gentille équipe.

L'adresse que l'on garderait bien pour soi mais qui mérite d'être divulguée à son prochain. Histoire de savourer, comme nulle part ailleurs, le charme discret d'un fort et délicieux bout du monde.

Château d'Ayres , 48 150 Meyruels
Tél. :04 66 45 60 10. 
Chambres : de 89 à 199 € / Demi-pension de 87 à 124 

Menus à 23, 34, 44 et 56 €.

Ouvert tous les jours / chateauxhôtels.com

 

>>> Découvrez ci-dessous une promenade à proximité du château de la Bourdaisière proposée par Se-balader.fr en partenariat avec Marianne

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