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Elle est pas belle l’Europe à l’allemande ?

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"In varietate concordia", "L’unité dans la diversité", telle est la devise de l’Europe. Aujourd’hui, elle prend un sens tout à fait particulier. Car s’il y a "unité", c’est une unité de vision imposée à tous par l’Allemagne. Et s’il y a "diversité", c’est une diversité de traitement selon que l’on est allemand ou pas...

« Pourquoi Angela Merkel s’acharne à humilier le peuple grec ». Le titre barre la une de L’Humanité ce lundi. « Humiliation », le mot est lâché. A juste titre. Quand, ce même lundi, Libération essaie visiblement de concilier toutes ses « tendances » internes en sortant un timide : « A quoi joue l’Allemagne ? » Bien sûr, à l’heure où le journal était mis sous presse, les détails du nouvel accord entre la Grèce et les autres pays de la zone euro n’étaient pas encore connus. Mais l’attitude intransigeante, provocatrice même, du gouvernement allemand, elle, n’avait pourtant échappé à personne ces derniers jours. « A quoi joue l’Allemagne ? » Mais la réponse est évidente. Aujourd’hui plus qu’hier. Elle joue à façonner une Europe à sa botte. Et elle gagne en plus !

Cela, plus personne ne peut l'ignorer. Le Prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz l'a d'ailleurs exprimé avec des mots simples, en marge d’une conférence : l’Allemagne a « porté un coup sévère et ébranlé l’Europe » et « a montré un manque de solidarité ». « Vous ne pouvez pas gérer une zone euro sans un minimum de solidarité, a-t-il poursuivi, [Cette crise] sape complètement la vision commune et la solidarité européenne. C'est un désastre ». Il n'est pas seul bien sûr à partager pareil diagnostic. Même Pierre Laurent, le patron des communistes français, d’habitude très mesuré, a jugé qu’Angela Merkel recherchait en réalité une « humiliation politique du peuple grec ».

A noter que beaucoup de ces critiques auraient été accueillies, le fusil à l’épaule, il y a encore quelque temps. Arnaud Montebourg eut droit en France (c’était en 2011, une éternité…) à son procès en germanophobie pour avoir accusé Angela Merkel de mener une « politique à la Bismarck »… Plus récemment, Jean-Luc Mélenchon, le co-fondateur du Parti de gauche, en a aussi fait les frais lors de la sortie de son pamphlet Le Hareng de Bismarck, le poison allemand, soupçonné ici et là de germanophobie tout aussi aigüe.

Il faut pourtant bien constater que le comportement du gouvernement allemand vis-à-vis de la Grèce n’obéit à aucune logique économique rationnelle comme l'a expliqué, avec beaucoup de perspicacité, Yanis Varoufakis dans une tribune publiée ce vendredi dans les colonnes du Guardian. Du moins, ce n’est pas le bien-être économique de la zone euro dans son ensemble qui est recherché mais le seul bien-être de l’Allemagne qui ne croit voir son salut que dans l’ordolibéralisme et la lutte contre l’inflation, cette obsession mortifère.

Preuve en est la facilité déconcertante avec laquelle son ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, évoquait la possibilité d’un « Grexit » sur tous les tons, faisant même circuler ce week-end, dans les chancelleries européennes, un document de travail non-officiel proposant une suspension « temporaire » de la Grèce de la zone euro.

Pis encore, dans ce même document était évoquée la création d’un fonds qui réunirait une grande partie des actifs de l’Etat grec (c’est-à-dire son patrimoine), géré par des technocrates européens et basé au Luxembourg ! Tout ça pour garantir que la Grèce se soumettrait bien aux exigences de privatisation. En somme, une mise sous tutelle de tout un peuple et d’un Etat souverain… Eh bien, ce fonds a vu le jour ! Certes, il sera basé en Grèce, mais l’esprit est là car il devrait être, nous dit-on, « supervisé par les autorités européennes ». L’Allemagne a donc réussi à imposer son choix de déposséder un pays et ses habitants d’une partie de ses biens !

Et dire que certains fanfaronnent depuis ce matin en nous expliquant que l’Europe a été sauvée. Et dire qu’un Eric Woerth, qui ne craint pas le ridicule, nous explique que l’appel de Nicolas Sarkozy, ce « teckel de Merkel » comme nous l’avions baptisé dans Marianne, a pesé dans la balance !

Il faut pourtant aujourd’hui s’interroger sur nos voisins germains et, plus encore, sur notre propre servitude (servilité ?) à leur égard. Il faut le faire en ne se voilant pas la face : les dirigeants allemands, qui mènent cette politique consistant à tordre le bras, jusqu’à la fracture ouverte, de leurs partenaires, ont le soutien de leurs électeurs. Il faut avoir en tête que dans ce pays, certains médias sont capables d’écrire de véritables insanités sur leurs « alliés » européens. Comme ce passage paru il y a quelques semaines dans le quotidien Die Welt qui nous explique que « la représentation selon laquelle les Grecs modernes sont les descendants de Périclès ou Socrate et pas un mélange de Slaves, de Byzantins et d’Albanais, a été pour l’Europe érigée en credo. » Bref, les Grecs seraient — voyez un peu l’ironie de l’histoire —  de sombres métèques ! Et nous serions germanophobes en refusant une telle attitude consistant à enterrer toute politique un tant soit peu alternative ?

« In varietate concordia », « L’unité dans la diversité » telle est la devise de l’Europe. Aujourd’hui, elle prend un sens tout à fait particulier. Car s’il y a unité, c’est une unité de vision imposée à tous par l’Allemagne. Et s’il y a diversité, c’est une diversité de traitement selon que l’on est allemand ou pas. C’est à se demander finalement si l’Allemagne aime véritablement l’Europe ? Elle n’aime en tout cas pas l’euro. Sinon, comment expliquer qu’elle vienne de démontrer à tout le monde qu’il est impossible de combattre l’austérité tout en conservant la monnaie unique…

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