>> Journal du teletravail - Travail a domicile | Actualité | France | La véritable épopée des Bronzés

La véritable épopée des Bronzés

Taille de la police: Decrease font Enlarge font

En ce mois d'août, "Marianne" se replonge dans ses archives estivales. Eté 2004, retour sur l'histoire de quatre garçons et deux filles qui aimaient s'amuser et jouer les amuseurs. Ils ont crée une troupe, le Splendid, puis ont fait un film. Le film est devenu culte et les six acteurs, des stars.

>>> Article paru dans Marianne du 14 août 2004

Au départ, c'est une bande de potes. C'est comme cela qu'on appelle, au sortir de Mai 68, les enfants de la bonne bourgeoisie qui décident de se placer du bon côté des pavés. Ils s'appellent Thierry Lhermitte, Gérard Jugnot, Christian Clavier, Michel Blanc, Marie-Anne Chazel... Ce qu'ils ne savent pas encore, c'est qu'ils vont devenir un phénomène de société tout d'abord, puis des stars à part entière. Pour l'instant, insouciants, ils déconnent à plein tube. C'est le temps des débuts, le temps de trouver leurs marques et de marquer les esprits. Ils appellent ça Le Splendid, du nom de ce théâtre de la rue Quincampoix qu'ils ont restauré (enfin, surtout Marie-Anne Chazel...) de leurs mains et à la sueur de leur front... avec, tout de même, les deniers de papa et maman !

On ne donne pas cher de leur peau, comme on ne donne pas cher de celle d'un de leurs copains, un certain Michel Colucci. Nous sommes en 1972, la bande passe tout de même son bac et Clavier entre à Sciences-Po. Ils ne doutent de rien, au point de se lancer dans une adaptation loufoque de Shakespeare lors de leur première rencontre avec Tsilla Chelton, leur professeur de théâtre et future Tatie Danielle. « C'est un souvenir très amusant, je l'ai encore devant les yeux. Ils se sont rendu compte eux-mêmes qu'il y avait du travail à faire », raconte-t-elle, plissant de rire ses yeux malins. Ils veulent travailler, devenir de « vrais » comédiens, se frotter aux textes classiques et apprendre à poser leur voix. Ils s'y mettent de bon coeur, partageant leur vie entre sketchs de café-théâtre et tragédies antiques. Bourreaux de travail, les comiques? Assurément. « Leur pugnacité les distinguait des autres élèves. Ils avaient le culte de l'effort. Avec eux, on pouvait répéter huit ou neuf heures d'affilée sans qu'ils rouspètent. C'était stupéfiant ! », se souvient Tsilla Chelton. Sans amertume, elle avoue qu'elle aurait aimé les voir devenir de grands acteurs de théâtre. Elle fait jouer Hamlet à Clavier et Richard III à Michel Blanc, « cela leur allait très bien »,assure-t-elle. Mais c'est la comédie qui les révélera au public.

Les représentations d'Amours, coquillages et crustacés (la version théâtrale et prélude des Bronzés) puis celles du Père Noël est une ordure ! remportent déjà un certain succès. Ecrites à 14 mains encore juvéniles, ces pièces à l'humour débridé et provocateur sont pile dans l'air du temps. Thierry Lhermitte en est bien conscient : « A cette époque, toutes les valeurs avaient explosé, on pouvait tout dire, tout faire, et on ne s'en privait pas. » Tout ? Pas tout à fait. La preuve : l'affiche du Père Noël est une ordure ! fut interdite dans le métro.

Mais ce qui faisait leur vraie force, c'était leur méthode de travail : « II fallait qu'une idée ait l'assentiment de tous pour qu'on la garde, raconte Thierry Lhermitte. Si l'un de nous disait "bof", ça dégageait ! » 

A l'opposé du comique visuel de Louis de Funès, la mégastar de l'époque, les comédiens de la troupe du Splendid s'amusent à jouer avec un naturel à toute épreuve les situations les plus absurdes. Une nouvelle forme de comique est née qui triomphe au cinéma avec les Bronzés. Pourtant, à en croire Thierry Lhermitte, seul un tiers des spectateurs de l'époque avait saisi qu'il s'agissait d'une parodie, à prendre au second degré : « Un autre tiers croyait qu'on décrivait le Club Med et trouvait ça nul, alors que le dernier tiers pensait que les GO pesaient vraiment leurs nanas avant de les sauter et rêvait d'aller au Club Med pour faire pareil ! » Comment naissent les malentendus... Inutile alors d'expliquer que les membres du Splendid n'ont jamais prétendu réaliser une étude sociologique des clubs de vacances. Ils aimaient simplement rire de tout. Mais sans méchanceté, sans « dérapages ». Certains de leurs personnages ont beau être très stupides, une énorme dose de tendresse les entoure toujours.

Ainsi, l'inoubliable Zézette du Père Noël est une ordure !, la clocharde à la voix chuintante, « enceinte jusqu'aux dents » mais tellement attachante. « On adorait jouer des cons et les défendre. Chez nous, il n'y avait pas de héros. C'étaient tous des cons, mais on les aimait bien quand même », commente Thierry Lhermitte. Cette tendresse à l'égard du genre humain est leur marque de fabrique. « Chez eux, il n'y a jamais une blague sur la religion ou la race. Parce qu'ils aiment les gens, tous les gens, et qu'ils se fichent de savoir à quel groupe social ils appartiennent », témoigne Yann, un « Splendidologue » de 27 ans qui prépare sa maîtrise de cinéma sur la troupe. Rien d'étonnant, donc, à ce que la diffusion du Père Noël est une ordure!  au moment des fêtes se soit imposée comme une tradition inébranlable. En décembre 2003, pour sa douzième diffusion (eh oui !), le film a permis à France 2 de remporter 30% des parts d'audience. Et lorsque TFl invite certains anciens du Splendid à participer à « Qui veut gagner des millions ? », 9 millions de téléspectateurs de plus de 4 ans sont devant leur écran. « Un score exceptionnel » pour la chaîne.

Le goût amer de l'après-soleil

Un tel succès fait forcément tourner la tête. Pour Tsilla Chelton, qui suit leur parcours avec affection, c'était inévitable : « Tous ont pris la grosse tête à un moment ou à un autre. C'est humain quand on gagne tant d'argent à un si jeune âge. Mais ils s'en sont sortis ! Tous ! Même ceux dont on dit encore du mal. » Luis Rego (qui ne faisait pas partie de la bande de départ) est plus amer lorsqu'il raconte l'après- Bronzés : « Je ne les ai jamais revus par la suite. Comme ça a tout de suite marché pour eux, ils sont restés dans leur truc, dans leur bande, sans se préoccuper des autres. » 

Mais voilà, la vie en communauté n'est pas une sinécure : écrire ensemble, répéter ensemble, jouer ensemble, partir en tournée ensemble... Au bout d'un certain temps, les anciennes querelles remontent à la surface. Thierry Lhermitte confie qu'après Le Père Noël est une ordure!, il s'est fait le porte-parole d'un mécontentement grandissant : « Balasko et Blanc n'étaient pas des plus assidus. Ils n'étaient pas les seuls à sécher les séances de travail. J'avais l'impression d'être le seul à bosser. J'en ai eu marre. » 

Mais briser une dynamique de groupe peut être fatal à ses membres. Et, dans les premiers temps, Lhermitte, Clavier et Jugnot n'en mènent pas large. Leurs premières tentatives scénaristiques en solo n'aboutissent pas. C'en est fini de l'état de grâce. Il leur faut devenir des adultes, des acteurs qui mènent une carrière personnelle. Pour Thierry Lhermitte, cette période de latence et de réflexion se transforme en traversée du désert. Les rôles qu'on lui propose ne sont que de pâles caricatures du Popeye des Bronzés... Le talent d'écriture en moins. Alors, il se lance dans la production et s'offre des personnages sur mesure, comme dans Un Indien dans la ville. Là encore, la recette du succès réside avant tout dans la création de situations loufoques.

Pour Gérard Jugnot, les choses évoluent de manière quasi similaire. Sorti du Splendid après un baroud d'honneur retentissant dans Papy fait de la résistance, malgré quelques belles performances d'acteur (Tandem), il peine à trouver ses marques. Il rase sa fameuse moustache et passe derrière la caméra. Nous sommes en 1992, le film s'appelle Une époque formidable et le coup d'essai est un coup de maître. Jugnot, dès lors, ira de succès en triomphe avec ses interprétations et ses réalisations, jusqu'à exploser avec les Choristes. 

Après Papy fait de la résistance, Le Splendid n'existe plus en tant que tel. Les copains se perdent un peu de vue et certains sombrent dans l'oubli, comme de Bruno Moyot (l'homme au slip noir des Bronzés, administrateur du Splendid et acteur occasionnel). En 1988, toutefois, Jean-Marie Poiré produit un film, Mes meilleurs copains, dont le scénario évoque une bande de potes qui se retrouvent vingt ans après avoir vécu ensemble en communauté. Difficile de ne pas faire un rapprochement avec Le Splendid. Christian Clavier y joue le rôle principal ; il est l'unique ressortissant du Splendid à participer à ce film qui ne sortira de l'ombre que quelques années plus tard, grâce à la télévision et à la vidéo.

Aujourd'hui, à l'heure où les jeunes effrontés sont devenus des quinquagénaires installés dans une profession qui leur rend de vibrants hommages, on entend depuis quelques mois des rumeurs évoquant un nouveau film en commun. Et, de fait, nous confie Patrice Leconte, Thierry Lhermitte et Christian Clavier travaillent ensemble sur le scénario des Bronzés numéro 3. Prions pour que la montagne n'accouche pas d'une souris !

Ajouter à: Add to your del.icio.us del.icio.us | Digg this story Digg


Comparateur mutuelle santé prévoyance

Devis mutuelle santé 100% gratuit et sans engagement.
Remplissez une seule demande pour comparer les tarifs, les garanties et les niveaux de remboursements des meilleures mutuelles santé du marché et économiser jusqu'à 300 euros par an.