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Le Bhoutan : le pays du bonheur décrété

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"There's no alternative" disait Margaret Thatcher, dame de fer du Royaume-Uni. Pourtant certains pays ont essayé et parfois réussi à imposer un autre modèle que le tout-libéralisme. Cette semaine Marianne propose un tour du monde de ceux qui ont essayé une autre voie. Petit pays coincé entre les deux géants que sont la Chine et l’Inde, le Bhoutan s’est fait connaître à l’international en vantant son système de « bonheur National Brut », un indice qui prend en compte le bien-être de sa population.

Le Bhoutan est un petit pays asiatique, niché au pied de l’Himalaya, qui partage ses frontières avec la Chine et l’Inde. Avec des voisins aussi imposants, le Bhoutan a dû lutter tout au long de son histoire afin de préserver sa parcelle de territoire. De par sa difficile accessibilité et son autarcie volontaire afin de protéger une identité fragile, le pays est demeuré longtemps très isolé. Ce n’est qu’en 1971 que le Bhoutan intègre officiellement les Nations unies et seulement en 1981 que le premier aéroport est construit sur le territoire.

Une grande partie de l’histoire du Bhoutan a été perdue lors de l’incendie de son ancienne capitale, en 1827. Toutefois, il existe des traces attestant de présence humaine sur le territoire à l’époque de l’Antiquité. Jusqu’au 17e siècle, le pays n’est rien d’autre qu’un ensemble de fiefs miné par les conflits entre ses seigneurs locaux. En 1616, un moine tibétain en exil s’installe au Bhoutan. Il parvient à unifier le pays et instaure un système de double gouvernance, à la fois spirituelle et administrative, qui prévaudra jusqu’à aujourd’hui. 

Bonheur national brut

Le Bhoutan s’est fait connaître sur la scène internationale par la création du « bonheur national brut », un indicateur qui diffère du classique Produit National Brut utilisé par la majorité des gouvernements afin de mesurer l’état de richesses de leurs citoyens. En effet, le BNB prend en compte le niveau de bonheur de ses habitants en se basant sur quatre principes fondamentaux : la croissance et le développement économique responsables, la conservation et la promotion de la culture bhoutanaise, la sauvegarde de l’environnement et la promotion du développement durable et, enfin, la bonne gouvernance responsable. 

En ce qui concerne la sauvegarde de l’environnement, il est difficile de nier les efforts déployés. Afin de se prémunir contre le tourisme de masse, le Bhoutan ne délivre qu’un nombre limité de visas chaque année et dans la majorité des cas, ceux-ci s’obtiennent par l’intermédiaire des tour-opérateurs locaux. Il faut aussi mentionner l’engagement constitutionnel de réserver au moins 60% du territoire aux forêts et autres zones boisées et le fait que chaque premier dimanche du mois, les voitures sont priées de rester au garage. Ces mesures vont de pair avec le « développement économique responsable », puisque le gouvernement défend les paysans et l’économie locale, et confie la gestion des forêts aux communautés rurales les plus pauvres. Les progrès en provenance de l’étranger sont minutieusement étudiés par la « commission du bonheur » qui décide s’ils sont solubles ou non dans le concept de « bonheur national ». C’est ainsi que la télévision par satellite et internet ne sont autorisés que depuis 1999.

Parmi les autres mesures à mettre au crédit du pays, il convient de mentionner l’absence totale de panneaux publicitaires, l'interdiction de la vente de cigarettes, l'interdiction des chaînes de fast-food ainsi que l’éducation et les soins gratuits pour tous.

Au niveau de la « gouvernance responsable », le fait le plus marquant de ces dernières années est la modification du système de monarchie absolue en une monarchie constitutionnelle. Cette évolution, que l’on doit à l’ancien roi du Bhoutan, un réformiste qui a abdiqué en faveur de son fils en 2008, a ironiquement été accueillie de façon mitigée par la population. Mais l’idée démocratique a fait son chemin et aujourd’hui, le Premier ministre en poste est un membre du parti d’opposition.

Derrière le sourire...

Malgré ce tableau idyllique, tout n’est pas parfait au pays du bonheur. Dans les années 80, le roi a lancé le programme « une nation, un peuple » qui a imposé la culture des bhoutanais d’origine tibétaine (langue, vêtements traditionnels) au détriment de ceux d’origine népalaise, qui représenteraient entre 20 et 50% de la population. Des manifestations antigouvernementales éclatent alors dans tout le pays. Les Lhotsampas (une ethnie hindouiste originaire du nord du Népal) arrivés après 1958 sont déchus de leur nationalité bhoutanaise et deviennent non seulement immigrés clandestins au Bhoutan, mais en plus apatrides, car le Népal ne veut pas d’eux non plus. Les Etats-Unis accueilleront sur leur territoire 80% de ces réfugiés dans le courant des années 2000.

Outre cette polémique, qui vient ternir l'image d'un pays tout en béatitude, le Bhoutan doit aujourd'hui faire face aux affres de la mondialisation, et ce malgré les efforts déployés pour la contenir. La fièvre consumériste s’est emparée de la population et certains n’hésitent pas à s’endetter lourdement afin d'acquérir les derniers gadgets à la mode. Les plus jeunes délaissent les campagnes et viennent grossir le rang des chômeurs dans les grandes villes, rêvant d’un avenir meilleur. En résultent des problèmes d’insécurité, d'alcoolisme et de consommation de drogues. Et le parc automobile a tellement augmenté ces dernière années que la population découvre les joies des embouteillages aux heures de pointes, qui mettent à l'épreuve les nerfs des bouddhistes les plus zen... 

Enfin, le « bonheur national brut » masque une réalité économique peu reluisante : 25% des habitants vivent sous le seuil de pauvreté, selon les critères de l’ONU. Et en creux de la volonté affichée par le gouvernement de mettre en place une agriculture 100% bio d’ici 2020, il ne faut pas faire l’impasse sur les problèmes de sous-alimentation qui touchent une partie de la population.

Mais en dépit de ces revers, absolument inévitables à moins de croire que le bonheur est un état qui peut être décrété, pour la journaliste Marie-Monique Robin, auteure du documentaire Bhoutan : au pays du Bonheur national brut, il y a tout de même dans ce pays « un effort sincère de penser autrement ». C’est déjà beaucoup. 

Anecdote :
Dans le royaume du Bhoutan, le chanvre pousse à l’état sauvage et est tellement prolifique qu’il est considéré comme un nuisible. Avant de tirer des conclusions hâtives sur les liens entre le bonheur d’une population et le cannabis en abondance, il convient de préciser que le Bhoutanais n’entretien aucune relation spécifique avec la plante et l’utilise, à la limite, pour nourrir ses cochons…

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