Lettre ouverte à Madame Dati

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Les Jeunes Avocats participeront activement à la journée de grève et de mobilisation dans toute la France du jeudi 29 novembre 2007. Ils remettront à cette occasion la lettre ouverte que le Président Lionel ESCOFFIER adresse à Madame le Garde des Sceaux.

Lettre ouverte à Madame Dati
Madame DATI,

Jeudi 29 novembre 2007, les associations et syndicats majoritaires des avocats (FNUJA et Conférence des bâtonniers), magistrats (USM), greffiers (SDGF) et des fonctionnaires du Ministère de la Justice se rassembleront devant la Représentation nationale, place Edouard Herriot à partir de 13h30. Parallèlement, des actions similaires se dérouleront dans toute la France aux sièges des différentes cours d’appel. Enfin, le Conseil national des barreaux, qui représente tous les avocats de France, a lancé un mot d’ordre national de grève des audiences pour cette date auquel nous répondrons.

Qu’est-ce qui motive une telle démarche à la fois interprofessionnelle, unitaire et apolitique ?

Alors qu’elle aurait pu être engagée à l’occasion d’une réforme générale de la Justice que nous appelons tous de nos vœux depuis maintenant de nombreuses années, la réforme de la Carte judiciaire suscite désarroi et incompréhension pour l’ensemble des professionnels de la Justice et des justiciables.

Il sera bien difficile de taxer de corporatisme ceux qui défileront ce 29 novembre : les magistrats concernés auront de nouveaux postes ; la majorité des avocats et du personnel des tribunaux qui marcheront ensemble ce jour là ne seront pas nécessairement les premiers touchés. A cette occasion, nos pensées iront toutefois vers tous ceux dont la vie professionnelle et personnelle va être totalement bouleversée, voire à reconstruire, ainsi qu’aux justiciables les plus fragiles.

Cette réforme et la réaction qu’elle suscite sont les symptômes d’un mal plus profond qui ronge l’organisation de la Justice depuis plusieurs années : celui de la non-concertation, que vous avez amplifiée depuis votre nomination Place Vendôme.

La quasi-totalité des textes rédigés et/ou votés concernant votre Ministère, n’ont fait l’objet d’aucune consultation ou si simplifiée que les acteurs concernés ont considéré qu’ils n’avaient pas été entendus.

Si nous parvenons à travailler avec les parlementaires les plus impliqués, tant de la majorité que de l’opposition, force est de constater que la Représentation nationale, y compris majoritaire, est elle-même négligée, au mépris de l’esprit de nos règles constitutionnelles, seuls les projets préparés par le pouvoir exécutif, que ce soit en pleine lumière ou en sous-main, étant adoptés.

La réforme de la Carte judiciaire a hélas été portée comme un symbole. Il est déplorable qu’elle n’ait pas plutôt été le fruit de la réflexion et de la concertation.

En effet, il est absurde de faire d’une telle réforme un objectif en soi au seul prétexte que cette carte a été dessinée en 1958. Modifier la Carte judiciaire a des conséquences économiques, sociales, humaines qui vont bien au-delà du seul monde judiciaire. Elle ne peut donc être que la conséquence d’une réforme d’ensemble de la Justice.

A tout le moins, compte tenu de son impact, cette réforme ne pouvait s’envisager sans une véritable concertation.

Or, tel n’a pas été le cas puisque :

- si un Comité consultatif a effectivement été installé en grande pompe à l’issue de votre discours en date du 27 juin 2007, il n’a, hélas, jamais été réuni ;
- les rapports des Chefs de Cour et des Préfets n’ont jamais été soumis à la concertation, de même que les études d’impact réalisées localement ;
- moins d’une semaine après la clôture de la période de consultation, qui ne peut en aucun être confondue avec la période de concertation qui aurait due lui être postérieure, vous avez annoncé le début imminent de votre tour de France.

Votre réforme conduit souvent à la suppression de juridictions qui parviennent à rendre la Justice dans des délais acceptables au profit de tribunaux déjà notablement surchargés et qui ne se verront pas dotés des moyens suffisant pour voir leur condition améliorée.

Quant aux quelques inflexions de dernière minute, il est dommage qu’elles ne soient que le fruit des accords passés avec des amis politiques locaux (cas du TI de LA FLECHE dans la Sarthe, dont vient Monsieur le Premier Ministre ; cas des TGI de GUINGUAMP, de MORLAIX, ou encore de celui du TI de CLICHY récemment rénovés à grands frais et qui répondent aux prétendus critères objectifs, mais situés dans des villes dont la majorité politique n’est pas la même qu’au plan national) ou d’événements abondamment relayés par les médias (cas de la suppression du TGI de MOULINS, voisin de MONTLUÇON en raison de la grève de la faim initiée par le bâtonnier de ce dernier barreau).

Nous dénonçons et stigmatisons cet état d’esprit.

N’oubliez pas Madame le Garde des Sceaux que la Justice ne peut se résumer à la Place Vendôme, qu’elle est le fruit d’une ancestrale et étroite collaboration entre tous les intervenants à l’œuvre de Justice sans laquelle il ne saurait être parlé de « Justice ».

La FNUJA dénonce depuis très longtemps l’indigence du budget de la Justice française, qui figure parmi les derniers de l’Union européenne. Cette réforme de la Carte judiciaire va engendrer de nouvelles et d’importantes dépenses (près d’un milliard d’euros) dans un budget déjà faible alors que les besoins se font sentir de manière cruciale, notamment dans le domaine de l’accès au droit.

On ne peut supprimer des Tribunaux de grande instance, d’instance, de commerce et des Conseil de prud’hommes en oubliant les principes mêmes de la Justice de notre pays, ceux de la proximité, de la célérité et du consensus.

C’est pour toutes ces raisons, Madame le Garde des Sceaux, que la Fédération Nationale des Unions des Jeunes Avocats participera activement à la journée de grève et de mobilisation du jeudi 29 novembre 2007, appelle tous les Avocats à venir rejoindre le cortège de ceux qui refusent la politique du fait accompli et de l’absence de concertation à l’Assemblée Nationale et envisagera de nouvelles actions communes avec les magistrats et les personnels judiciaires.

Madame le Ministre, merci d’écouter, pour une fois, les professionnels du Droit et de vous rappeler de l’existence de cette boussole politique : l’intérêt général.


Lionel ESCOFFIER
Président de la FNUJA

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