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Thomas Charat, L’EFB de demain doit être beaucoup plus professionnelle, Interview, Affiches parisiennes, 14 avril 2017

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Le président de l’UJA de Paris continue à être vent debout contre l’augmentation des droits d’inscription à l’EFB, votée récemment par le CNB. Il est, en revanche, beaucoup plus en phase avec les conclusions du rapport Haeri et la nécessité d’évolution de la profession d’avocat.

Affiches Parisiennes : Le ministre de la Justice ne semble pas favorable à l’augmentation des droits d’inscription à l’EFB votée par le CNB. Quelle est la réaction de l’UJA de Paris ?

Thomas Charat : Sur cette question des droits d’inscription à l’EFB, nous restons vigilants. Il y a effectivement eu des annonces du garde des Sceaux, mais ce n’est pas lui qui mettra en œuvre cette décision. Puisqu’il y a eu un vote, le CNB entreprendra sans doute des démarches auprès du futur ministre de la Justice pour obtenir son aval sur cette mesure.

Nous invitons la profession à réfléchir une nouvelle fois aux différents modes de financement des écoles, en s’inspirant des établissements qui fonctionnent et qui parviennent à l’équilibre, en influant à la fois sur la formation initiale et sur la formation continue. Les confrères doivent également se pencher sur un nouveau statut de l’élève-avocat avec des contrats de professionnalisation qui pourraient permettre de bénéficier de financements externes. Je pense notamment à la taxe d’apprentissage. A mon avis, ces pistes ont été trop rapidement abandonnées.

A.-P : Pouvez-vous rapidement détailler ces alternatives de financement ?

T.C. : Les finances de l’EFB de Paris ne sont pas d’une transparence extrême et j’ai cru comprendre que le garde des Sceaux demandait à l’ensemble des écoles françaises de mettre réellement au jour leurs coûts de fonctionnement. Ce premier audit serait intéressant.

En fait, les sources de financement peuvent être diverses. Et les écoles qui n’atteignent pas l’équilibre pourraient s’inspirer de cet audit pour prendre les mesures adaptées plutôt que de ne réfléchir que par le biais des augmentations de frais d’inscription. Nous pourrions notamment avoir recours à la taxe d’apprentissage. Des questions se posent évidemment sur la validation des acquis professionnels au regard des obligations déontologiques. Pour bénéficier de cette taxe, il faut, en effet, avoir intégré la VAE

–validation des acquis de l’expérience, ndlr– dans son mode de fonctionnement. Pour l’instant, ce n’est pas le cas. Des questions se posent aussi sur les obligations déontologiques qu’il faudrait mettre en place. Cela se fait, par exemple, pour les juristes d’entreprise au bout d’un certain nombre d’années d’exercice.

La profession doit, par ailleurs, continuer à financer partiellement l’EFB, sachant que l’Etat, qui s’était engagé à financer à hauteur de 50 %, se désengage complètement, dans le contexte actuel de restriction budgétaire.

On peut également réfléchir au mode de fonctionnement des bourses d’études, voire s’inspirer de ce que fait Sciences Po, à travers une modulation des frais d’inscription. Il y a donc de nombreuses pistes à prospecter.

A.-P : Vous accordez une grande importance à la formation des avocats. Comment la trouvez-vous aujourd’hui ? Certaines choses doivent-elles être améliorées ?

T.C. : Le programme national qui est mis en place va dans le bon sens. Il s’agit de professionnaliser un peu plus. C’est d’ailleurs ce que nous appelons de nos vœux, avec des matières et des groupes plus restreints. A notre sens, il n’appartient pas à l’école de refaire ce que fait l’université. Il ne faut pas oublier que l’EFB est une école professionnelle qui délivre un certificat d’aptitude à la profession d’avocat. En réalité, il faudrait recentrer l’enseignement sur certaines matières, évidemment sur la déontologie, évidemment sur l’aspect pratique du contentieux et des questions de procédure. Pour développer l’esprit entrepreneurial, quelques aspects du conseil et quelques outils de management devraient également être pris en compte. Revenir sur un programme d’un an est une bonne chose. L’EFB de demain doit donc être beaucoup plus professionnelle. Nous aimerions aller vers un véritable statut de l’élève-avocat proche de l’apprentissage, faisant ses classes en étant déjà partie prenante de la profession, avec les protections sociales associées.

A.-P : Quelle est l’actualité des formations de l’UJA de Paris ?

T.C. : L’actualité des formations prodiguées par l’UJA est toujours riche. Le 24 avril prochain, un grand colloque est organisé à l’auditorium de la Maison du barreau. Il réunit des avocats, des universitaires, des magistrats et des notaires, autour des évolutions du droit de la famille. Cet événement est gratuit et sera validé au titre de la formation continue.

Le 7 juin prochain, toujours à l’auditorium de la Maison du barreau, nous organisons un colloque sur les besoins de droit des PME.

Il faut ajouter les formations, notamment, en droit des sociétés, en relation avec Affiches Parisiennes et ses outils dédiés au formalisme, pour permettre aux jeunes avocats de bien appréhender leurs premiers dossiers.

A.-P : Le rapport Haeri abordait lui aussi l’avenir de la profession d’avocat, notamment à travers la formation, l’avenir de la collaboration… Qu’en pensez-vous ?

T.C. : Tout d’abord, le rapport Haeri fait du bien par son optimisme et sa volonté d’insuffler à la profession un souffle d’ouverture. On y retrouve la fierté d’être un avocat heureux et pleinement ancré dans le XXIe siècle.

L’UJA de Paris a été auditionnée par Kami Haeri et sa commission et nous sommes agréablement surpris de retrouver en filigrane certaines de nos propositions. Je pense notamment à la suppression de l’interdiction de l’apport d’affaires. Cette recommandation de l’UJA a été formulée une première fois en 1994, puis par deux fois en 2013, sous la présidence de Massimo Bucalossi. Elle figurait ainsi dans le rapport des Etats généraux de la collaboration que nous avons initiés à l’époque et la même année dans un autre rapport « Associer un collaborateur » consacré à la carrière du jeune avocat. Cette proposition a une finalité entrepreneuriale.

Dans le rapport Haeri, on trouve aussi cette idée de professionnalisation de l’élève-avocat qui est également l’un de nos combats. On découvre aussi tout un pan sur l’égalité et sur le bonheur qui sont des combats de l’UJA, menés en leur temps par notre présidente d’honneur, Valence Borgia, et notre invité permanente, Karine Mignon-Louvet, par exemple.

Ce rapport, en ligne avec notre doctrine et nos combats, aurait peut-être pu aller plus loin sur la collaboration, mais ce n’était pas forcément sa vocation première. Sur différents points, il alterne entre soft law et hard law, avec la volonté de modifier certains dispositifs. Sur d’autres sujets, Kami Haeri semble vouloir faire évoluer les mentalités par le biais de la soft law.

Nous verrons quelles seront les retombées de ce rapport publié en fin de mandature de François Hollande, contrairement au rapport Darrois qui était intervenu en début de mandature de Nicolas Sarkozy.

A.-P : La profession doit donc évoluer ?

T.C. : De toute façon, notre profession doit évoluer, être ancrée dans son temps, en tenant compte des évolutions technologiques. L’UJA de Paris y est favorable, à la condition que cette évolution soit toujours raisonnée, dans le respect de nos principes essentiels. Notre déontologie reste notre force et notre plus value.

A.-P : Y-a-t-il des points du rapport Haeri que vous contestez ; l’avocat en entreprise, par exemple ?

T.C. : L’UJA de Paris avait, à l’époque, considéré que la solution de l’avocat salarié en entreprise pourrait être envisagée à des conditions très précises. L’avocat devait être avocat de plein exercice, intégralement soumis aux obligations déontologiques et professionnelles de l’avocat et relever de la juridiction du bâtonnier notamment. C’est donc une approche beaucoup plus encadrée que celle proposée par Kami Haeri et aucun projet récent ne satisfait de près ou de loin à ces conditions que nous estimons cependant déterminantes. D’une façon plus générale, ce rapport nous apparaît néanmoins conquérant et positif. Au moment où il est paru, le CNB adoptait des positions assez opposées, avec la collaboration qualifiante d’un côté et l’augmentation des droits d’inscription de l’autre. L’instance représentative de la profession n’envoie pas ce message d’ouverture à la fois aux confrères et au monde extérieur. Kami Haeri, que nous avons reçu à notre Commission permanente pour qu’il nous présente son rapport (l’assemblée délibérative de l’UJA, ndlr) n’a pas manqué de relever cette contradiction.

Quelques semaines plus tard, les modifications de l’article 14 du RIN sur la collaboration libérale, portées au CNB par Matthieu Dulucq, président d’honneur de la FNUJA, ont été pour l’essentiel rejetées par une majorité de circonstance conservatrice qui voit dans le jeune avocat une atteinte à une rente de situation, alors qu’il est créateur de richesse pour la profession dans son ensemble.

A.-P : Et concernant la mobilité professionnelle des avocats, également abordée dans le rapport Haeri ?

T.C. : Nous y sommes très favorables. Par exemple, la suppression de la règle des 15 ans de la CNBF a longtemps été l’un de nos combats. Elle était un frein à cette mobilité. A l’UJA de Paris, nous portons depuis plusieurs années l’idée d’une grande profession du droit. Les avocats doivent être dans les cabinets, dans les entreprises, alternant avec la magistrature, avec les autorités administratives indépendantes… Pour développer le « réflexe avocat », théorisé en son temps par notre président d’honneur Romain Carayol, il faut que ce dernier puisse être partout. Nous sommes donc très attachés à cette mobilité. C’est un facteur essentiel de développement et de rayonnement de notre profession.

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